Jeu de cache-cache dans les ajoncs - Pu Erh Sheng (普洱生), Cru du Singe 2016
Dégustation du 23 février 2018
Quand je prends le temps de préparer
et boire un bon thé – grand cru, thé éphémère ou thé de qualité plus simple –,
l’expérience se transforme chaque fois en un voyage porté par
les couleurs, les odeurs, la texture du thé, mais aussi par les souvenirs qui
remontent à la surface, l’imaginaire et l’imagination, les résonances qui se
réveillent au contact des feuilles et des liqueurs.
Voici donc l’histoire d’un voyage
en 8 tasses de Pu Erh Sheng, un Pu Erh
cru, non fermenté.
Photographie de l'artiste Don Hong-Oai |
Tranquillement, je longe le cours
d’eau. A l’horizon, une montagne verte. Frémissement dans les ajoncs. Un animal
est là, qui se promène lui aussi. Une biche peut-être ?
Le Pu Erh Sheng que je tiens au creux des mains me raconte un jeu de cache-cache au gré des va-et-vient de l’animal qui s’amuse derrière les tiges hautes et dorées.
La première tasse est limpide, d’un
doré pâle aux nuances rosées… la
délicatesse et la légèreté de la liqueur claire contrastent fortement avec la puissance de l’odeur animale soutenue par
un fort parfum de sous-bois qui se dégage des feuilles à peine déployées
par 5 secondes d’infusion. La note cuirée, animale est légèrement acide au nez.
La civette aussi est là, comme dans un parfum
interdit, trop intense pour être porté.
2ème infusion : le doré de la liqueur s’accentue. Les feuilles exhalent l’osier mouillé, je sens un jardin de bambous après l’ondée. Sillage de racines légèrement moisies et de sous-bois au. L’animal se cache. On le sent là, tapi derrière les tiges hautes. Souvenirs d’un sillage de parfum Hermès, le parfumeur sellier... Kelly Calèche.
3ème infusion : les feuilles se sont ouvertes, le Pu Erh s’épanouit, l’animal s’étire, se calme et se laisse approcher. Dans un parfait équilibre, notes cuirées et notes végétales s’harmonisent en douceur, soutenues par une fine astringence, une texture souple et ronde. Quelque part, une belle pêche duveteuse sur un arbre ajoute une note fruitée au paysage.
4ème et 5ème
liqueurs : explosion de notes
végétales d’osier mouillé. Les
bourgeons ont laissé s’échapper une multitude de minuscules flocons qui procurent
une fine astringence en
bouche.
6ème tasse :
l’animal resurgit. Pic aromatique
qui rappelle, en plus intense, l’équilibre de la 3ème tasse. Rondeur
pleine comme une lune.
7ème et 8ème
infusions : les feuilles de thé sont totalement déployées, les arômes se s’estompent,
la liqueur d’or se fait plus douce, plus fruitée.
Aucune onde sur le fleuve. L’animal a disparu entre les ajoncs. Seul
reste son souvenir. Sans amertume.
Pour
se procurer ce thé et apprendre à le préparer :
Pour
aller plus loin dans la connaissance des thés Pu Erh
Sur le photographe Don Hong-Oai